Le bassin méditerranéen est un point chaud de la biodiversité mondiale, et les zones humides sont un élément important et spécifique pour le maintien de ce statut. La région méditerranéenne est célèbre pour ses prestigieuses zones humides deltaïques telles que Doñana en Espagne, la Camargue en France et le delta du Nil en Égypte, ainsi que pour ses grands lacs salés intérieurs (chotts et sebkhas en Afrique du Nord), ses oasis, ses étangs temporaires et ses marais. Ceux-ci dépendent dans une large mesure d’un climat variable, qui entraîne d’importantes fluctuations interannuelles de l’étendue et des fonctions des écosystèmes.
A travers ses deux rapports régionaux (Perspectives des zones humides méditerranéennes 1 et 2; MWO1 et MWO2 respectivement), l’Observatoire des Zones Humides Méditerranéennes (OZHM) a évalué le statut et les tendances de ces écosystèmes dans le bassin méditerranéen depuis 2010. Ces rapports ont fait des zones humides l’un des rares écosystèmes à avoir été évalués à cette échelle. Entrepris sous l’égide de l’Initiative MedWet de la Convention de Ramsar, le travail de suivi en cours par l’Observatoire est soutenu par tous les pays de la région méditerranéenne, qui sont tous membres de MedWet. Le dernier bilan régional sur les zones humides (MWO2 : 2018) a récemment été résumé en tant que dernier chapitre du livre « WATER RESOURCES IN THE MEDITERRANEAN REGION », edité par Mehrez Zribi, Luca Brocca, Yves Tramblay and François Molle, paru chez Elsevier. (https://www.elsevier.com/books/water-resources-in-the-mediterranean-region/zribi/978-0-12-818086-0).
Les voyants sont au rouge ! Nos zones humides méditerranéennes sont menacées
Les rapports MWO1 et MWO2 ont démontré une tendance continue de perte et de dégradation des zones humides méditerranéennes. La perte de zones humides naturelles depuis 1970 s’élève à 48%. En outre, l’abondance des espèces dépendantes des zones humides a diminué de 15% entre 1990 et 2013, avec des tendances contrastées entre les groupes taxonomiques. Dans l’ensemble, 36% d’entre elles sont menacées d’extinction. L’abondance des espèces dépendantes des zones humides, menacées au niveau mondial, a même diminué de 46%.
Sur un échantillon de zones humides, l’urbanisation a augmenté de près de 300% et les terres cultivées de 42% entre 1975 et 2005. Inversement, de nombreux habitats artificiels de zones humides ont été créés, et près des deux tiers d’entre eux ont remplacé des zones humides naturelles. Mais malgré la perte constante de zones humides naturelles, la superficie des eaux de surface intérieures a augmenté de près de 13% dans le bassin méditerranéen au cours des 30 dernières années, ce qui s’explique en partie par la rapide augmentation de la construction de barrages dans la région.
La pression sur les ressources en eau douce ne cesse de s’accroître. La consommation d’eau a considérablement augmenté au cours du XXe siècle, en particulier pour l’irrigation qui représente aujourd’hui les deux tiers de la consommation régionale. La quantité totale d’eau douce déversée chaque année par l’ensemble des rivières dans la Méditerranée a diminué d’environ 45% au cours du XXe siècle, en raison à la fois du changement climatique et du prélèvement d’eau par les populations. Bien que la qualité de l’eau dans les zones humides méditerranéennes continue de diminuer, certaines améliorations ont été constatées en Europe en ce qui concerne la Demande biochimique en oxygène (DBO), les nitrates, les phosphates et l’ammonium. En Afrique du Nord et au Moyen-Orient, la tendance est clairement à une dégradation de la qualité de l’eau dans la plupart des zones humides.
Avec la diminution du nombre, de la superficie et de la qualité des zones humides méditerranéennes, leur capacité à fournir des services écosystémiques a rapidement diminué ces dernières années. Par exemple, la région a perdu environ 20% de la capacité des zones humides à réguler les inondations.
Cependant, les pays continuent de s’engager à protéger les zones humides et le nombre de sites désignés dans le cadre de la Convention de Ramsar continue d’augmenter – bien que seulement 44% de ces sites Ramsar soient dotés d’un plan de gestion en cours de réalisation.
Il existe donc un besoin urgent de sensibilisation à tous les niveaux de la société, du grand public aux décideurs, sur les raisons pour lesquelles les zones humides méditerranéennes doivent être protégées et gérées de manière durable.
Plus d’informations :
En savoir plus sur le statut des zones humides méditerranéennes et les messages clés à l’intention des décideurs dans les deux rapports :
– Les zones humides méditerranéennes : Enjeux et perspectives 2012
Contact :
Christian Perennou, Tour du Valat
perennou@tourduvalat.org
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