RENCONTRE GRECO-FRANCAISE A EGINE

La 10ème session du Comité des Zones humides méditerranéennes qui régit l’initiative méditerranéenne trans-régionale de la Convention de RAMSAR, organisée par le Ministère français de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement Durable et de la Mer, a eu lieu près de BASTIA, sur l’île de Corse du 31 mai au 3juin 2010.

L’un des points forts de cette rencontre a été « La participation de jeunes élèves aux activités de MedWet ». En effet, avec l’assistance de leur enseignante, Martine PHILIBERT, les élèves de la classe Environnement et Développement Durable du Collège de l’ILE-ROUSSE (département de la Haute-Corse) avaient simulé un scénario d’aménagement sur le bassin versant de l’Etang de Biguglia, zone humide classée au titre de la Convention de Ramsar. Dans ce jeu impliquant plusieurs parties prenantes, les élèves avaient respectivement joué les rôles de Maire, de pêcheur local, d’aménageur de golf, d’expert scientifique, rendant compte ainsi de la réalité des conflits d’usages sur un site. Après une intervention fort appréciée des élèves du collège de l’ILE ROUSSE, le Comité des zones humides méditerranéennes avait noté dans sa résolution 21, que Néjib BENESSAIAH, secrétaire général de l’initiative MedWet, invitait les enseignants et les élèves du collège corse à rencontrer des jeunes élèves grecs pour échanger sur la spécificité des zones humides mais aussi pour acquérir une meilleure connaissance des cultures méditerranéennes.

C’est à présent chose faite : la rencontre gréco-française a eu lieu du 4 au 8 mai 2011 et s’est déroulée à Athènes et sur l’Ile d’Egine. Le collège de l’Ile Rousse était représenté par sa principale, Jacqueline RODE. Martine PHILIBERT, professeur agrégée en sciences de la vie et de la terre, avait « sélectionné » 14 filles et garçons de la classe. Nicolas FREMONT, éco-conseiller du Conseil d’architecture, d’urbanisme et d’environnement de la Haute Corse (CAUE) ayant contribué à la mise en oeuvre du jeu de rôle, Julia CULIOLI, représentant la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du Logement (DREAL de Corse) et Mauricette FIGARELLA, trésorière du CAUE, encadraient les jeunes gens. L’Office de l’environnement de la Corse, partenaire régional contractuel de cette thématique zones humides dans la région, n’était pas représenté, mais reste très impliqué dans les divers projets liès à cette thématique.

La délégation corse a été accueillie à Athènes le 4 mai 2011 par l’équipe du Secrétariat MedWet et installée dans un hôtel du quartier de Plaka. La première journée de travail a commencé le 5 mai 2011 par la visite de la zone humide de VAVRONA, située à la périphérie d’Athènes : zone humide d’embouchure, alimentée par une rivière pérenne et prairies humides présentant une belle diversité de biotopes et d’espèces justifiant son inscription au réseau Natura 2000. Menacée par la proximité de la mégapole, la zone est activement gérée par le personnel d’une Association de protection des oiseaux et bénéficie surtout, pour sa protectionet sa préservation, de la présence proche d’un site archéologique. Il est aussi intéressant de noter que ce site a été spécialement aménagé pour les non voyants ; ainsi diverses structures aidant ces personnes ont été installées : « guide » au sol sur le chemin, panneaux explicatifs rédigés en brail, maquettes en résines des animaux et végétaux rencontrés mais aussi du relief de la zone …, enregistrements des cris des oiseaux ….

L’après midi a été consacré à la découverte du Centre de protection de la tortue marine, Caretta caretta, géré par la Sea Turtle Protection Society of Greece. Un exposé sur l’origine de l’espèce et sur ses sites de reproduction dans les îles grecques, complété par une visite de l’infirmerie, a permis à l’ensemble des hôtes corses de bien comprendre la situation de l’espèce en Méditerranée.
En fin d’après midi, la délégation corse a été invitée à faire un voyage dans le temps avec la visite du prestigieux site archéologique de l’Acropole : sous les yeux émerveillés et les oreilles attentives des jeunes élèves, un retour sur  2500 ans d’une histoire riche en évènements, berceau de notre civilisation, a été effectué par une guide locale.

Le 6 mai 2011, le Secrétariat MedWet a organisé la rencontre entre les enfants français et ceux d’une classe grecque à l’île d’Egine. Le temps d’une traversée en bateau depuis Athènes, une heure trente de préparation pour les enfants corses pour approcher d’autres insulaires, pour les connaître et sans doute à terme les reconnaître. Sur le quai, très simplement, les élèves grecs souhaitent la bienvenue aux français qui leur offrent des petits objets symbolisant l’île de Corse. Malgré la barrière de la langue, le premier contact semble réussi. Comme celui des adultes qui font connaissance avec les enseignants et des parties prenantes de la société civile. La découverte d’Egine s’est poursuivie par la visite de trois petites zones humides côtières subissant diverses pressions (VLYHADA, VAGIA, MARATHONAS). Vlyhada semble menacée par la plantation d’une oliveraie et la construction de seuils digues pour canaliser l’eau sur le bassin versant. Sur le site de Vagia, la construction d’une maison individuelle en rive droite se réalise en dépit de la présence d’une zone inondable. Le secteur de Marathonas, riche en espèces floristiques et ornithologiques, a été comblé pour permettre la construction d’un immeuble régulièrement inondé par la montée des eaux en hiver.
Sur le terrain, l’Equipe du Secrétariat MedWet et son Coordinateur Nejib BENESSAIAH ont animé le dialogue et nourri la réflexion en invitant des experts et intervenants locaux : un géologue, un ichtyologue, un forestier, une résidente vivant sur les lieux, une ONG favorisant les activités d’écotourisme. Hélène, l’interprète du groupe, permet l’établissement de la communication. Tout au long de ces deux journées à Egine, les acteurs grecs et français ont échangé leurs points de vues et pris des notes. Les nombreux échanges leur ont permis de découvrir la législation de leur pays respectifs comme les conditions de l’obtention des permis de construire, etc….

Evidemment, l’ensemble des partenaires ont reconnu que les petites zones humides sont menacées, souvent par méconnaissance de leur rôle et de leur fonctionnement. Il a donc été important de montrer ces exemples aux enfants pour bien leur faire comprendre l’impact négatif des aménagements sur les milieux humides de petite superficie.

Ce fut le thème de « l’atelier sur la conservation de petites zones humides. » Tout d’abord, Néjib Benessaiah et son équipe ont engagé une réflexion générale avec l’ensemble des élèves grecs et corses. Guidés par un jeu de questionnements, les élèves ont identifié les différents acteurs rencontrés sur les sites humides visités. Une deuxième série de questionnements a permis de classer ces acteurs en différents groupes. A l’issue de cette première étape, les élèves ont été invités à rejoindre un groupe de travail correspondant à chaque catégorie socio-professionnelle précédemment identifiée.

Chaque groupe de travail a réfléchi aux problématiques rencontrées sur le terrain. Pour les aider à construire leur raisonnement, l’équipe de MedWet leur a préparé un questionnaire et deux animateurs ont animé les débats dans chaque groupe de travail. De plus, des experts se sont tenus à la disposition des élèves pour répondre à leurs éventuelles demandes.

Une réunion plénière a permis la restitution des synthèses présentées par les enfants grecs et français (traduction réalisée en simultané par Hélène et Alexandre  Tsipouridou) en présence de M. Marakis représentant la Municipalité d’Egine, particulièrement attentif aux propositions des enfants :

–    obtenir des autorités locales l’application des lois de planification pour éviter les constructions illégales ;
–    demander aux autorités locales d’organiser des contrôles fréquents pour identifier les résidents et entrepreneurs qui déversent les eaux usées dans les zones humides ;
–    demander aux autorités locales de nettoyer les zones humides en enlevant les embâcles qui font obstacle à la circulation de l’eau. Ce programme de nettoyage doit faire l’objet d’une étude préalable et les travaux doivent être suivis par une personne compétente ;
–    créer des associations de citoyens bénévoles qui permettront de protéger les zones humides par leur présence sur le terrain, en organisant des opérations de nettoyage, des activités de sensibilisation du public et en informant les autorités compétentes des actions qui portent atteinte à l’écosystème humide ;
–    mettre en place des panneaux signalétiques porteurs d’informations sur la faune, la flore, les fonctions et les services rendus par les zones humides, pour les résidents et pour les touristes ;
–    favoriser l’ouverture de chemins pour permettre la découverte de la zone humide par visiteurs et touristes, sans porter atteinte à la flore et à la faune du secteur.

Le maire adjoint d’Egine a félicité le groupe d’enfants pour la qualité du travail réalisé, les enseignants ainsi que toutes les personnes qui s’étaient investies dans cette opération. En réponse aux suggestions des élèves, il s’est engagé dorénavant à porter une attention particulière aux petites zones humides côtières présentes dans tous les projets urbanistiques de l’île.

Profitant de cette intervention, Nejib Benessaiah s’est engagé à transmettre au maire adjoint d’Egine un rapport complet sur la situation des petites zones humides côtières de l’île, ainsi que les propositions pour leur sauvegarde. Les jeunes élèves ont donc pleinement joué leur rôle « d’experts » de l’Initiative MedWet. Leur présentation d’ensemble a permis in fine aux adultes d’entrer en relation avec les autorités dirigeantes d’Egine. Cette expérience montre bien que les enfants, les adolescents sont un excellent vecteur de communication et de sensibilisation. La qualité de leur travail, les valeurs morales qu’elles sous-tendent comme la responsabilité et l’engagement citoyen, ont permis un premier contact entre l’initiative MedWet et la commune d’Egine.

Les enfants français ont ensuite présenté l’outil pédagogique sur les zones humides « A l’écoute des zones humides », élaboré en Corse par la DREAL, l’Office de l’environnement et le CAUE de la Haute Corse. Ils ont développé l’importance du jeu de rôles à endosser et la difficulté à défendre son point de vue dans les conflits d’usages. A l’issue des ateliers, il a été décidé d’intégrer les fiches établies par l’équipe MedWet dans la méthodologie de l’outil pédagogique zones humide, afin de permettre une meilleure compréhension du jeu de rôles. Un beau travail d’équipe franco-grec à souligner !

Pour la délégation française, ces journées de travail dans l’île d’Egine ont été émaillées de visites culturelles du temple d’AFIA et du village de PALIOHORA, sous la conduite de Mme (nom prénom), guide éminemment compétente pour susciter un dialogue participatif des enfants. Un espace de temps libre a permis aux participants adultes de visiter la ville d’Egine et de ramener des souvenirs en Corse. Les enfants grecs ont invité les français à participer à un match de basket. La barrière de la langue était définitivement dépassée en fin d’épreuve.
L’ensemble des participants s’est rendu dans une taverne d’Egine pour un dernier partage, pour la remise de souvenirs de l’île aux français, pour l’échange des adresses et des numéros de téléphone, pour se dire au revoir……..et pour faire la promesse de revenir.

Une amitié franco-grecque est née ! Les enfants français ont adoré cet échange avec leurs homologues grecs. Au-delà de la problématique « zones humides », ils se sont rendus compte que les jeunes grecs partagent leurs mêmes préoccupations liées notamment à l’avenir de notre société.
Le mérite de ce succès revient à l’Equipe du Secrétariat MedWet et son Coordinateur Nejib BENESSAIAH qu’il convient de féliciter pour leur organisation et pour la chaleur de leur accueil.

Mais le travail n’est pas achevé, car il faut à présent permettre à cette  expérience d’éclore dans d’autres pays de la Méditerranée. Déjà, en filigrane, des noms de pays sont avancés : le Maroc, la Tunisie, la Jordanie…….

Car il est important que les jeunes enfants français transmettent leur savoir-faire, leur méthode d’approche des zones humides à d’autres jeunes enfants du pourtour méditerranéen. Ils deviendront ainsi les passeurs d’un message qui est toujours bien reçu parce qu’il est émis par la bouche d’un enfant. Car mieux que celle de l’adulte, la parole d’un enfant qui traduit simplement la réalité est entendue par les autorités comme étant objective, dénuée d’arrière-pensée et d’agressivité.

Encore BRAVO pour cette belle expérience humaine en faveur des zones humides méditerranéennes.